Publié le 31. juillet 2022

Beyoncé proclame sa «RENAISSANCE»

Le nouveau Beyoncé est un événement musical - mais surtout en apparence car il est moins politique que son prédécesseur «Lemonade» de 2016. Sur «RENAISSANCE», le dancefloor devient un safe space et la house music un porteur d'espoir.

Journalist
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Le nouvel album de Beyoncé est une véritable fête. Ce qui est assez étonnant, car il a été écrit, enregistré et produit en grande partie en pleine pandémie. Dans un communiqué publié à l'occasion de la sortie de "RENAISSANCE", Beyoncé a déclaré : "La création de cet album m'a permis de rêver et de m'évader de la réalité à une époque effrayante pour le monde. Il m'a permis de me sentir libre et aventureuse à une époque où peu de choses bougeaient par ailleurs. Mon intention était de créer un safe space, un lieu sans préjugés. Un lieu où l'on est libre de tout perfectionnisme et de tout doute de soi. Un endroit où l'on peut crier, lâcher prise et ressentir la liberté. C'était un beau voyage de découverte". En écoutant les 16 chansons de l'album, qui se passent de tout matériel de remplissage digne de ce nom, on en arrive à la conclusion que Queen Bey s'y est libérée avant tout en dansant à outrance sur de la disco et de la house music, comme nous le supposions déjà lors de la sortie du single "Break My Soul" - qui misait sur un sample puissant de l'emblématique "Show Me Love" de Robin S, elle-même reine de la house music dans les années 1990. La pochette emblématique jette également un pont direct vers le légendaire Club Studio 54 - c'est là qu'en 1977, le mannequin Bianca Jagger a chevauché sur la piste de danse un cheval blanc, qui était d'ailleurs guidé par un homme nu comme un ver.

"RENAISSANCE" commence par une déclaration lyrique comme on en connaît de Beyoncé. Dans "I'M THAT GIRL" (oui, elle écrit tous les titres de chansons en majuscules), elle précise : "It's not the diamonds / It's not the pearls / I'm that girl (I'm that girl) / It's just that I'm that girl (I'm that girl) / It's not my man (Ooh) / It's not my stance (Ooh) / I'm that girl (I'm that girl) / It's just that I'm that girl". Elle le fait sur un sample de "Still Pimpin'" de Tommy Wright III & Princess Loko & Mac T-Dog, s'inclinant ainsi devant les origines du rap sudiste. Deux chansons plus tard, Beyoncé redevient une "ALIEN SUPERSTAR" à part entière et affirme qu'elle est trop extraterrestre pour venir de ce monde. Dans une chanson, d'ailleurs, qui cite plus de vingt auteurs-compositeurs au générique. On pourrait et devrait même écrire un essai entier sur qui et quoi se trouve dans cet album.

Et cela nous amène au cœur de "RENAISSANCE" : Après l'ultra-politique "Lemonade", très important pour le mouvement "Black Lives Matter", et l'hymne BLM "Black Parade", beaucoup espéraient que Beyoncé poursuivrait dans cette direction de manière similaire. Ce n'est explicitement pas le cas : on trouve rarement des lignes politiques directes dans les 16 chansons. Mais c'est là que le message devient décisif avec "Safe Space" de sa part : les textes tournent en effet beaucoup autour de choses privées, de l'évasion libératrice, de l'amour de soi et de la force libératrice et porteuse d'espoir qui peut se déployer sur une piste de danse - surtout en période de morosité.

Le titre "RENAISSANCE" acquiert également une force étonnante si l'on considère tous les participants de l'album. Il ne contient pas seulement le mot "renaissance", mais aussi cette période de l'histoire de l'art et des idées qui a débuté vers 1400 et qui avait pour but de faire revivre l'art et les idées antiques. Ce que Beyoncé veut faire revivre ici, c'est l'ADN noir de la house music et du rap, qu'elle tisse dans ses chansons avec des samples comme ceux mentionnés.

La liste des invités de "RENAISSANCE" est peut-être la déclaration la plus puissante, car Beyoncé y réunit, trié sur le volet, tout ce qui compte. Son mari Jay-Z, Skrillex, 070 Shake, The-Dream, Drake, Beam, Tems et la grande Grace Jones, qui régnait déjà sur le Studio 54 et que l'on entend ici, merveilleusement mal lunée, dans la chanson "Move", où elle peste au nom d'elle-même et de la reine Bey : "Move out the way / I'm with my girls and we all need space(Mm) / When the queen come through, part like the Red Sea / Move out the way". Ici, veuillez penser à un micro drop - et à vous écarter ...

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