Alexander McQueen: une histoire de mode en musique

Pour revenir brièvement sur qui était Lee Alexander McQueen, on peut dire qu’il était l’un de stylistes les plus brillants de notre époque et que sa vision créative a ouvert la voie à une nouvelle forme de collaboration entre les designers et les artistes. C’est que le Britannique était un amateur de musique et l’utilisait comme un moyen de créer une expérience immersive pour le public lors de ses défilés.

Ses bandes sonores sont souvent devenues aussi mémorables que les tenues elles-mêmes, à l’image de son défilé automne/hiver 1995-1996, intitulé «Highland Rape», où il avait utilisé des bruits de cloches d’église mélangés à des track clubbing pour évoquer l’exploitation de l’Écosse par la Grande-Bretagne. Tous y avaient vu du sexisme, lui avait répondu: «I’ve seen a woman get nearly beaten to death by her husband. I know what misogyny is… I want people to be afraid of the women I dress».

Ce premier coup d'éclat lui ouvrira les portes des Givenchy en 1996, la même année où il créera une pièce iconique, pour un musicien iconique: David Bowie.

Un proche de McQueen racontera, qu'un jour, alors qu'il était avec le styliste, ce dernier avait reçu un coup de fil directement de la part de David Bowie. Il avait rapidement raccroché, «un peu excédé par la célébrité et sa demande», mais il acceptera finalement de travailler pour lui et créera une pièce qui allait devenir emblématique: une redingote faite à partir d'un drapeau Union Jack géant, avec des poignets en dentelle noire qu'il s'était amusé à piétiner pour lui donner un aspect plus original.

Bowie avait tant aimé cette pièce, qu'il décida de la porter pour la pochette de son album «Earthling» et ce fut le début d'une vraie amitié entre le parrain du glam rock et l'enfant terrible de la mode.

Amitié sans faille pour Björk

Björk et McQueen ont travaillé ensemble pendant de nombreuses années. Leur collaboration a commencé en 1997, lorsque McQueen prit la direction artistique du projet «Homogenic» de la chanteuse après qu'elle ait vu une photo de Devon Aoki en geisha. Le designer créera alors son célèbre kimono dont la chanteuse se souvient encore, notamment à cause du photoshooting: «J'avais dix kilos de cheveux sur la tête, des lentilles de contact spéciales, une manucure qui m'empêchait de manger avec mes doigts, du ruban adhésif autour de la taille et des sabots hauts qui m'empêchaient de marcher facilement».

Liés par leur amour de la nature et leurs visions artistiques similaires, leur travail ensemble était souvent décrit comme «magique» et la chanteuse islandaise sera proche du designer jusqu'à la fin, chantant à la cérémonie en hommage à sa disparition, puis, plus tard, en sortant avec Nick Knight – qui avait shooté la couverture d’«Homogenic», la bande-son du court-métrage «To Lee, With Love, Nick».

Nouvelle icône avant-garde

En 2009, à l'aube son 2e album, Lady Gaga qui a enfin trouvé un succès monstre, sort «Bad Romance» le premier single de «The Fame Monster». Dans la vidéo, on la voit affublé de multiples tenues, mais celle qui fait mouche, c'est celle ou les portes ces drôles de chaussures presque animales: les Armadillo. Le créateur de mode britannique avait imaginé ces talons en forme de tatou pour «Plato's Atlantis» sa dernière collection qui traitait du changement climatique et de la théorie de l'évolution de Charles Darwin, imaginant un monde où les humains avaient évolué pour survivre sous l'eau après une inondation mondiale.

Ensuite, de tapis rouge en tapis rouge, la Lady ne cessera de porter du McQueen qui disparaîtra le 11 février 2010. À peine un mois plus tard, lors des BRIT Awards, elle lui dédicacera sa performance et expliquera plus tard: «Il n'y a pas de diamant, pas de prix, rien que je n'ai jamais voulu plus que le souvenir de ma brève amitié avec McQueen. Je suis triste chaque jour lorsque j'entre dans mon placard, sachant qu'il n'est plus là pour éblouir le monde de son esprit magnifique, sombre, illimité et courageux».

Et pour en revenir à la musique et son lien avec feu Lee McQueen, en 2020, la maison désormais conduite par Sarah Burton, a édité des playlists des défilés de la marque. Quant aux artistes, à l'image de Lizzo, ils continuent de porter les créations du génie disparu.

L'exemple même du «win-win»

Depuis longtemps, les créateurs de mode se sont inspirés de la musique pour créer des collections qui reflètent l'esthétique de certains genres musicaux, tandis que les musiciens ont utilisé la mode pour créer des looks emblématiques qui renforcent leur identité artistique. Une vraie influence sur la culture populaire depuis des décennies et qui continueront d'inspirer des générations de fans, et d'artistes de tous les médiums.